Un prof de droit s’est fendu d’une réponse au fameux mail qui a inondé nos boites.
En voici un résumé à faire lire à ceux qui se poseraient des questions…
Le texte complet se trouve en faisant une recherche au nom de Bastien François ! Bises positives !
Réponse au texte d’Étienne Chouard sur le Traité
établissant une Constitution pour l’Europe
par Bastien François
Professeur de science politique et de droit constitutionnel
à l’Université Paris I (Panthéon-Sorbonne),
auteur de Pour comprendre la Constitution européenne (Odile Jacob)
Le débat engagé sur le Traité établissant une Constitution pour l’Europe (TCE) est
légitime : il est nécessaire d’échanger arguments et contre-arguments pour le « oui » ou pour
le « non », et cela peut-être plus encore pour les citoyens de gauche (dont je suis, sans être
membre d’aucun parti) dans la mesure où le TCE est accusé de bafouer les valeurs de la
gauche en faisant le lit de l’ultra-libéralisme.
A ce titre, tout le monde a le droit de s’exprimer, y compris bien entendu M. Chouard,
professeur au lycée Marcel Pagnol de Marseille, et de faire valoir ses arguments. Le texte de
M. Chouard a circulé partout en France dans les boîtes aux lettres électronique de nos
concitoyens. Malheureusement, alors que M. Chouard commence son texte en revendiquant
son identité de professeur de droit (qui s’est avérée usurpée…), son argumentation véhicule
de nombreuses erreurs juridiques et de grossières incompréhensions du fonctionnement de
l’Union européenne. Son texte contribue donc à fausser le débat démocratique sur la
Constitution européenne.
J’ai donc pensé qu’il était essentiel d’en informer tous les citoyens, qu’ils soient
partisans du « oui » ou du « non », pour qu’ils ne soient pas trompés par des arguments
mensongers.
Afin de mieux être compris, je présente ici d’abord un résumé de des erreurs ou des
approximations d’Etienne Chouard, puis une analyse plus approfondie sur les 5 points qui
sont au coeur de sa démonstration. Merci de prendre le temps de me lire, et de faire circuler
ce texte le plus largement possible, pour rétablir les bases d’un débat… non faussé.
RÉSUMÉ
1. « Longueur du texte » : Le traité tient en 28 pages format journal. Avec les
annexes et les protocoles, c’est plus long, mais c’est parce que le texte fait la synthèse des
50 ans de construction européenne. Si l’on ne prend que ce qu’il y a de nouveau dans le
TCE par rapport aux traités existants (qui sont compilés dans la partie 3), il n’y a que
quelques pages à lire (les parties 1, 2 et 4 représentent moins d’1/5 du volume).
2. « Références libérales » : VRAI, mais le texte codifie dans le même temps de
très nombreuses contraintes sociales et environnementales qui s’imposent dorénavant
au niveau européen, contraintes qui n’étaient pas présentes dans les précédents traités
(notamment les articles I-3, II-80 à II-97, III-116 à III-122, III-203 à III-224, III-233 et III-234).
3. « Révision nécessitant l’unanimité » : VRAI, MAIS c’est la situation de tous les
traités européens existants. Même s’ils ne s’appellent pas « Constitution », ils partagent
avec le projet en cours le fait de n’être révisables que par ratification unanime et le fait d’être
juridiquement supérieurs à la loi nationale. Cependant, le TCE sera plus facile à réviser
que les traités de Nice et Maastricht, et en particulier pour la partie III grâce à une
procédure de révision simplifiée et des clauses passerelles (art. IV-444 et IV-445).
Surtout, le Parlement européen aura le droit d’initiative pour demander une révision.
4. « Caractère temporaire du Traité de Nice » : FAUX. Son article 11 stipule qu’il
est établi pour une durée indéterminée.
(Ce sont aussi les mêmes dispositions qu’on retrouve dans l’article IV-446 du TCE et
dans les traités précédents : l’article 51 du traité sur l’Union Européenne et l’article 312 du
traité instituant la Communauté européenne.)
5. « Entrée de la Turquie facilitée et décidée par l’Union »: FAUX. Les
compétences de l’Union sont très précisément définies (I-11 à I-18) : l’entrée de tout
nouveau membre est soumise à ratification de chaque État membre, selon ses règles
constitutionnelles propres (I-58-2). La France a révisé sa constitution pour que toute nouvelle
adhésion ne puisse être validée que par référendum, ce qui nous garantit un vote avant cette
adhésion.
6 . « Tous les pouvoirs appartiennent au Conseil des ministres et à la
Commission » : FAUX. La Commission n’a qu’un pouvoir de proposition. Elle doit
exécuter les décisions prises par le Conseil des ministres et le Parlement. Dans l’Union
européenne, union des citoyens et des Etats, le pouvoir législatif a deux branches. Les
citoyens sont représentés au Parlement, c’est l’une des branches du pouvoir législatif. Le
Conseil des ministres représente, lui, les Etats membres de l’Union, c’est l’autre branche du
pouvoir législatif. Les pouvoirs du Parlement européen ont été considérablement
augmentés par le TCE, qui sera dorénavant sur un pied d’égalité avec le Conseil des
ministres (procédure législative ordinaire III-396).
7. « Les Commissaires européens ne sont pas responsables devant le
Parlement » : FAUX, les membres de la Commission (le « gouvernement européen »)
sont proposés par le Conseil des ministres et investis par le Parlement
européen (comme le président de la Commission, proposé lui par le Conseil européen)
; ils sont responsables à tout moment devant le Parlement qui peut voter une motion
de censure contre la Commission.
8. « Le conseil des ministres n’est pas responsable devant le Parlement » : VRAI,
mais NORMAL. Le Conseil des ministres n’est pas responsable devant le Parlement, car
c’est la 2ème chambre législative. Imagine-t-on, en France, le Sénat responsable devant
l’Assemblée nationale ? En revanche, chaque gouvernement national est responsable
devant son Parlement national et donc devant ses propres électeurs. De plus, les
délibérations et votes du Conseil des ministres seront publics (I-24-6), c’est une
innovation majeure du TCE allant dans le sens de la transparence, du contrôle démocratique
et de la responsabilité politique des gouvernements nationaux au sein du Conseil des
ministres européens.
9. « Le Commissaire chargé du commerce international agit sans contrôle du
Parlement » : FAUX (III-315-3), le commerce international fait l’objet d’une loi européenne ;
le Conseil des ministres et le Parlement doivent être associés aux négociations.
10. « Pour la première fois, ce serait une caution populaire donnée à un traité
européen » : FAUX, le traité de Maastricht a été lui aussi adopté en France par
référendum en 1992.
11. « Les droits fondamentaux et les valeurs de l’Union sont de beaux principes
généraux sans force contraignante »: FAUX. La conformité des actes de l’Union avec
TOUS les articles de la Constitution est vérifiée par la Cour de Justice européenne (III-364),
qui peut les annuler en cas de non-conformité (III-365). Toute personne peut saisir la Cour
pour faire respecter ses droits (sur ce point, le TCE va plus loin que notre Constitution
française qui ne permet pas de saisine directe du Conseil constitutionnel).
12. « Il aurait fallu élire une Assemblée constituante pour écrire le texte ». Toutes
les constitutions, même les plus démocratiques, ne sont pas rédigées de cette façon. Le plus
important ici c’est que la Constitution européenne a été rédigée par une « Convention
européenne », comptant 72 élus (sur 105 membres), élus au suffrage universel direct, et
représentative des principaux courants d’opinion en Europe (voir détail de composition
dans la partie 4 ci-dessous)
13. La Convention a travaillé sur le texte dans la transparence et en public, en
consultation avec les représentants syndicaux et associatifs, dans un dialogue
constant et nourri avec la société civile européenne.
Rappel de la nature juridique de l’Union européenne
L’union Européenne est un ensemble politique unique, une union d’Etats et de
citoyens. Elle se constitue donc sous la forme d’un traité (accord international entre des Etats
souverains) et d’une constitution (acte de souveraineté des citoyens). Jamais dans l’histoire
des démocraties, jusqu’alors entièrement centrée dans le monde occidental autour du modèle
de l’Etat-nation, n’a été créé de toutes pièces un véritable système politique démocratique
supranational. D’où la nécessité de repenser de fond en comble les catégories avec
lesquelles nous appréhendons de façon générale les systèmes politiques, et en particulier
l’opposition traditionnelle entre le national et l’international.
Car penser une Europe politique démocratique aujourd’hui c’est nécessairement
rompre avec ce type d’opposition entre le national et l’international, c’est inventer quelque
chose de nouveau qui tienne compte de l’existant (il y a des Etats européens souverains, des
cultures politiques nationales, des intérêts nationaux), qui s’inscrive dans une continuité (les
traités qui ont scandé la construction européenne) mais qui permette dans le même temps de
s’en dégager pour bâtir un nouveau mode de démocratie. Autrement dit, nous devons
apprendre à penser le national en même temps que l’international, sans les dissocier. C’est
ce qu’essaie de faire ce « traité établissant une Constitution pour l’Europe ». Il s’agit bien
d’établir une constitution inter-nationale, européenne.
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Question posée à Jeremy Rifkin, économiste américain :
La Constitution européenne, soumise au vote des Français le 29 mai, incarne-t-elle ce rêve européen ? L’échec du référendum marquera-t-il la fin du rêve ?
Réponse : Voilà ce que je dis à chaque citoyen français, quand vous irez voter pour ou contre la Constitution européenne, il y a une question simple à vous poser : est-ce que vous pensez que la prospérité future de votre famille repose sur les frontières étroites de votre pays ou bien sur le plus grand marché du monde qu’est celui de l’Europe ? La Constitution européenne, un document de 256 pages, est étrangère à la mentalité américaine, car elle contient beaucoup de droits que nous n’avons pas (les droits à la vie, le droit à des congés payés, etc). Les nouveaux droits de l’homme sont le coeur et l’âme de ce texte. C’est donc une avancée considérable. Les valeurs et les objectifs de la Constitution européenne constituent l’étoffe d’un rêve européen naissant. Ce qui est très important dans cette Constitution européenne, c’est que si les droits de l’homme sont violés en France, les citoyens peuvent se tourner vers la Cour européenne des droits de l’homme. Pour la première fois, les Européens peuvent défendre leurs droits à l’extérieur de leurs frontières, auprès d’une institution extraterritoriale.
merci pour ce texte tres interressanta plus bisous
Merki pour toutes ses informations,et je me permet aussi de dire que votree blog est très bien et très original.
Un bien beau morceau de propagande. Merci. J\’aime beaucoup le couplet sur la france archaïque qui ne veux pas accepter la "modernité" et "la Réforme", mots délicieusement inventés par les libéraux pour masquer la casse en règle des aquis sociaux et des services publiques tout ça parce qu\’en Chine on bosse 60 heures par semaines pour 50€ par mois et qu\’il faut tout niveler par le bas au lieu d\’aller vers l\’excellence. Tant que ce genre de monsieur viendra expliquer aux gens qu\’ils sont archaiques parcequ\’ils refusent le retour en arrière en matière sociale et bien les gens voteront….à votre avis? si si cherchez bien, c\’est pas difficile, vous pouvez le faire. 😉
Il y a toujours eu et il y aura toujours une France archaïque, une France qui regarde vers le passé ou qui se voile la face. En 1958, par exemple, certains ne voulaient pas entendre parler de l\’autodétermination de l\’Algérie…. Il ne s\’agit nullement de dire (ça c\’est un propos réducteur) que si en Chine on travaille pour 50€ par mois, il faut qu\’en France, on fasse de même, ou que l\’on baisse les salaires. Par contre, la France ne peut pas faire comme si elle était seule ! Seule au monde. Sans concurrent ! S\’adapter, ce qui serait la meilleure définition de l\’intelligence, c\’est un combat de tous les jours. On s\’adapte ou l\’on disparait. Maintenant on peut dire que s\’adapter c\’est gagner 50€ par mois…pour ma part, je pense que le probléme n\’est pas là. Comme un ménage, un Etat ne peut dépenser que ce qu\’il gagne. Certes, il peut s\’endetter (depuis 30ans on ne s\’en prive pas), mais vient le jour où il faut payer la facture. Et ce texte a l\’art de mettre le doigt là où ça fait mal et de montrer ce que certaines autruches aimeraient ne pas voir. Malheureusement, la réalité est toujours têtue ! Pour moi, il est aussi clair que voter non va mettre un terme au chomage, aux délocalisations, à la misére, aux jours de pluie et aux jours fériés qui tombent un dimanche ! On a envie de conclure par un vibrant Alleluia !
Pour compléter sur le thème : faudra bien payer l’addition un jour, sous une forme ou sous une autre : LA DETTE DE LA FRANCE EST AUJOURD’HUI SUPÉRIEURE À 1000 MILLIARDS D\’EUROS. Tellement énorme qu’il faut quelques références pour s’en représenter l’importance : C’est l’équivalent de plus de 63% des richesses produites dans ce pays durant une année ! C’est 4 fois le budget de l’Etat ! Par tête de pipe : 16 000€ de dettes ! Merci !Mieux encore : LE PAIEMENT DES INTÉRÊTS REPRÉSENTE PAS LOIN DE 50 MILLIARDS D’EUROS ! SOIT 1/5 DU BUDGET DE L’ÉTAT….seulement pour payer les intérêts….89% de l’impôt sur le revenu et 140% de l’impôt sur les sociétés ! Et ce malgré des taux d’intérêts historiquement bas….Tout le monde connaît la chanson : « Tout va très bien Madame la Marquise ! » Eh bien chantons maintenant 🙂
je n\’ai qu\’un mot, car je me fatigue au fur et à mesure de débiter des arguments que personne ne peut comprendre (je ne parle pas d\’ici mais bien de là où je suis). cette constitution n\’est pas qu\’un débat, elle est devenue un combat pour ceux qui veulent avancer, la barrière de l\’incompréhention et de l\’ignorence (car il faut la lire, ou pas, mais ne pas croire à cette fin de la France unique et dominante… nous ne perdrons pas notre identité si c\’est cela dont ils ont peur, le libéralisme? nous y sommes déjà dedans et pourquoi reculerait-on maintenant face à une avancée, ne serait-ce pas tout simplement parce qu\’il y a enfin un texte qui stipule les choses noir sur blanc? vous savez à quoi ce débat me fait penser? au même débat que la réforme lycéenne face aux jeunes… ces français rétrogrades me font penser à des jeunes lycéens, refusants pour exister… bah, excusez mon emportement… je suis consterné…). Ce mot, le seul qui compte à mes yeux: oui
Et que penses tu des délocalisations des grosse entreprises? D\’accord ca se fait déjà, mais est-ce que cela ne va pas s\’empirer? Dans la constitution, le plus grand profit revien quand même à ces entreprise et aux politiciens(sauf les extremes qui votent pour le non, mais on ne peut pas dire que je les apprécie vraiment)…J\’adore voyager, j\’aime beaucoup l\’Europe et je suis super ravie d\’accueillir des pays comme la Turquie ou la République Tchèque ou je suis déjà allée…Mais sincèrement je ne sais pas encore trop ce que je vais voter…On verra le jourJ
Sur ce sujet, mais je ne prétends pas non plus avoir la science infuse, j\’ai envie de te renvoyer la question (sur laquelle on focalise parce que c\’est un sujet important, mais la réponse n\’est pas entre les mains ou les lignes de la Constitution à laquelle on demande trop de choses…!)La question est : penses-tu que voter « non » va stopper les délocalisations ? Et si oui, comment ? Mais encore une fois c\’est un problème qui va bien au delà de la Constitution pour une raison simple : si on pouvait combattre les délocalisations pour une Constitution…cela se saurait….!!! Or, comme chacun le sait, ce n’est pas le cas !
Moi je trouve ca plutot pas mal que les gens s\’emportent sur ce sujet parce que au moins chacun se sent concerné. Le fait est que des réformes ou des consttitutions en general mettent du temps a s\’etablir et je pense que c réellement aux jeunes plus ou moins jeunes de bien reflechir sur les consequences de cette constitution irrémediable !!!! Tout d\’abord pour repondre au premier commentaire, etre contre cette constitution européenne ce n\’est pas etre contre l\’Europe c\’est etre contre une certaine europe avec des idéologies que je ne partage pas. Donc la question est la suivante : Poursuit-on la construction d\’une Europe liberale, puissance de feu de la mondialisation capitaliste ou batissons nous une europe sociale, écologique, pacifiste, solidaire, démocratique ??Le premiere question que je me pose c d\’ou sort ce texte ??? et il se trouve que ce traité européen est le resultat de négocitaions, de sommets et de compromis entre les gouvernements. Cela expique sans doute ses ambiguités, ses contradictions…. Mais les peuples eux n\’ont pas eu voix aux chapitres, ni leurs élus, leurs syndicats, leurs associations, leurs organisations non gouvernementales. Or le statut de ce texte lui confere toute puissance. En effet la constitution et le droit de l\’union européenne priment sur le droit des etats memebres mais a la difference des consttitutions nationales, il sera quasiment impossible de l\’amender ou de revenir en arriere car il fodrait l\’accord simultané de tous les gouvernements de l\’union et de tous les peuples pour le modifier.Contrairement a toute autre constitution, elle definit un systeme economique. Elle sacralise la concurrence. Ce texte n\’est pas seulement d\’\’essence liberale, il veut constitutionaliser un systeme politique : le capitalisme !! Et il ve limiter les possibilités d\’amendemant ou de changements ulterieurs.Le "non " ne provoquerait aucun chaos !!! Il serait le moyen de réorienter la construction européenne avec un otre traité pour une europe sociale ! Le " non " est aussi constructif, tout aussi européen. Il jetterait les bases d\’une europe progressiste et coopérative, actrice d\’un monde solidaire et de paix.Votez "non" n\’est pas dire "non " a l\’Europe bien o contraire c croire en elle !!!!
J\’entends bien ce qu\’il y a de généreux dans ton discours. Je sais aussi les défauts de cette Europe et je souhaite qu\’ils puissent se corriger (cela pose le pb difficile de savoir comment les citoyens prennent leur destin en main!) Maintenant, avec ces défauts, cette Europe, elle existe, elle vit, elle avance et on lui oppose des grands mots, des grands principes. Évidemment tout le monde souhaite un monde meilleur ! Mais en pratique on fait quoi et surtout on fait comment ? Par ailleurs, la concurrence est une chose qui est naturelle, ne regardons pas l\’économie avec des yeux d\’ange asexué. on sait bien dans quels charniers les grands principes ont terminé….Il faut faire avec la réalité. Et garder ses principes en se gardant de croire au Père Noël….!