La surprise de la rentrée
Véritable moment de grâce musical et théâtral, Le Cabaret des hommes perdus offre une soirée inoubliable. Un auteur (Christian Siméon), un metteur en scène (Jean-Luc Revol), père du projet, et quatre comédiens (Jérôme Pradon, Alexandre Bonstein, Sinan Bertrand et Denis D’Arcangelo), accompagnés par l’excellent pianiste Patrick Laviosa (compositeur des chansons), et la magie est au rendez-vous. Le public aussi qui, d’entrée, répond présent et plébiscite ce moment magique.
Sensitif et Artisthea reviendront sur la pièce et vous présentent, pour l’heure, deux des quatre comédiens, Denis D’Arcangelo et Sinan Bertrand.
Denis D’Arcangelo
Chantons dans le placard, La Duchesse de Langeais, Madame Raymonde, c’est lui ! Mais une seule de ses prestations suffit pour ne pas l’oublier. Que ce soit dans ses spectacles pour enfants, ses rôles classiques, son théâtre de rue, Denis D’Arcangelo apporte à ses personnages une vérité et une humanité touchantes. Jean-Luc Revol l’a transformé en maître de cérémonie dans le rôle du Destin. Denis explique : « Le projet a mis trois ans pour éclore. Christian Siméon (un de nos grands auteurs contemporains) a pris le temps de venir voir jouer chacun d’entres nous pour écrire un texte qui nous colle à la peau. »
Capable de tout jouer, ce comédien, né en Normandie d’une famille originaire d’Italie, a fait ses débuts au mythique Piano Zinc. « C’était ma deuxième maison, un endroit charnière où j’ai décidé de mon métier, où j’ai rencontré mes amis, ceux avec qui je travaille aujourd’hui. » S’il reconnait que le plaisir du comédien consiste à alterner les genres, il avoue qu’en tant que spectateur, le théâtre musical est celui qu’il préfère. En tant qu’interprète, il y est formidablement à l’aise, avec sa voix atypique, lui qui chante plutôt intuitivement avec une certaine gouaille, tout comme madame Raymonde ! Ce personnage dont il revêt les atours régulièrement date de ses débuts dans le théâtre de rue avec son compagnon Philippe Dilheir. Arletty dans Hôtel du Nord les a inspirés, mais très vite le personnage est devenu indépendant.
N’ayant jamais choisi la facilité, toujours défenseur de spectacles, certains modestes mais tous excellents, Denis D’Arcangelo ne cache pas sa joie : pour lui, ce cabaret est une bénédiction, un cadeau tombé du ciel. « Travailler en ce moment avec des gens que j’aime et que j’admire me pousse à donner le meilleur de moi-même. »
Sinan Bertrand
« On me propose surtout des projets musicaux et j’adore ça. » Ce chanteur né en Turquie, ayant fait son lycée au Caire avant de s’installer en France à l’âge de dix-sept ans, a participé à Zapping, Créatures, Hair et Ali Baba, qui a occupé deux ans de sa vie. « Ce métier que j’aime me permet de vivre, c’est une grande chance ! », dit-il avant de préciser qu’il s’agit de tout sauf d’une existence sédentaire. Avant de s’installer au Rond-Point, il participe à une tournée de six mois en Italie avec Conchita Bonita d’Alfredo Arias. Un emploi du temps ayant des répercutions sur la vie privée, il faut savoir s’adapter, souligne Sinan, « seuls les gens du spectacle peuvent comprendre (et accepter) les rythmes qui sont les nôtres ».
Homme de troupe (« mes meilleurs souvenirs sont avant tout liés à de bonnes équipes »), il est comblé par le projet : « Moi qui déteste le faux copinage, ici je suis vraiment heureux. » D’autant que le travail s’est fait uniquement dans la joie, ici personne ne prétend que la création doit passer par la douleur ! Ce bonheur à quatre (avec Denis D’Arcangelo, Jérôme Pradon et Alexandre Bonstein) est partagé par les spectateurs trouvant ici, de l’avis général, un spectacle avec des qualités et un savoir-faire digne de Broadway. Au passage, Sinan lance une fleur à Patrick Laviosa : « Sans parler de ses talents de compositeur, tellement évidents, il est tout de même le meilleur accompagnateur de Paris ! »
Pour Le Cabaret des hommes perdus, Sinan Bertrand doit entrer dans la peau de deux personnages féminins, une drag-queen et une vieille star déchue, haute en couleur et hystérique, née dans l’esprit de Jean-Luc Revol d’une multitude de références cinématographiques. « Un défi ! Il fallait apprendre à se maquiller (on a une costumière hors pair, par contre nous n’avons pas de maquilleuse), à bouger sur des talons (ce n’est pas rien !) ou à chanter avec une voix tronquée. » Sans oublier les changements de costumes fréquents et hyper rapides capables de rendre Arturo Brachetti jaloux ! Allez vous étonner ensuite que les comédiens aient le sentiment de se sentir en apnée durant la représentation et sur les rotules à la fin…
Il n’est pas étonnant non plus que Sinan ait planifié, après les représentations du Rond-Point, des vacances à Londres où ce fou de comédies musicales pourra aller entendre les nouveautés de la rentrée, en songeant que pour une fois, Paris n’a aucune raison de se montrer jaloux !
Théâtre du Rond-Point : 2 bis, rue Franklin-Roosevelt 75008 Paris – M° Franklin-Roosevelt
Jusqu’au 22 octobre avec possibilités de prolongation, du mardi au samedi à 21 h et dimanche à 17 h 30
01 44 95 98 00