Soie

La superbe histoire d’Alessandro Baricco est magnifiée par la mise en scène de Christophe Lidon et l’interprétation de Samuel Labarthe. Quelques inoubliables instants de douceur…!

Baricco est un conteur. Ce jeune auteur a conquis l’Italie avec presque autant de best sellers que de romans. « Soie » publié en 1997 n’échappe pas à la règle. Cette nouvelle à l’écriture ciselée et vive, magnifiquement simple et efficace, retrace une surprenante histoire de voyages et d’amour à travers le destin d’une petite cité des Cévennes où explose soudain l’industrie du ver à soie.

"Baldabiou était l’homme qui, vingt ans plus tôt, était arrivé dans le bourg, s’était dirigé droit sur le cabinet du maire, y était entré sans se faire annoncer, avait posé sur son bureau une écharpe en soie couleur de crépuscule et lui avait demandé:

– Savez-vous ce que c’est ?

– Affaires de femme !

– Erreur. Affaires d’homme : de l’argent.

Le maire le fit jeter dehors. Lui, il construisit une filature, en bas, près de la rivière, un hangar pour l’élevage des vers à soie, accolé à la forêt, et une petite église consacrée à sainte Agnès, au croisement de la route pour Viviers. Il engagea une dizaine d’ouvriers, fit venir d’Italie une mystérieuse machine en bois, toute en engrenages et en roues, et ne dit plus rien pendant sept mois. Puis il revint chez le maire et posa sur son bureau, bien alignés, trente mille francs en grosses coupures.

– Savez-vous ce que c’est ?

– De l’argent.

– Erreur. C’est la preuve que vous êtes un con."

Sans nous laisser un instant de répit, l’histoire ainsi commencée va aller jusqu’à sa surprise finale. Hervé Joncour, le narrateur, est envoyé au Japon dans le but de ramener des vers à soie qu’en Cévennes, la maladie a rendu rare. Il effectue ainsi plusieurs voyages qui vont transformer sa vie. On découvre comment, dans l’amour, l’intensité va de pair avec l’inaccessibilité. La rareté du moment (couplé à son côté risqué) contribuent à donner aux sentiments une force exceptionnelle.

Dans la peau du héros, Samuel Labarthe se révèle en parfaite osmose avec l’œuvre. Son jeu d’une grande simplicité – chaque mot, chaque geste est juste – atteint des sommets. Dans un décor très épuré et une mise en scène qui stimule l’imagination, il se met tout entier au service d’un texte empreint de poésie, de sensualité, ayant la saveur et le charme des moments heureux de l’existence.

Philippe Escalier

photo : D. Michau

Studio des Champs-Elysées : 15 avenue Montaigne 75008 Paris M° Alma Marceau – du mardi au samedi à 20h30 & samedi 17h – 1h45 – 01 53 23 99 19

A propos Sensitif

Journaliste, photographe, éditeur du magazine Sensitif : www.sensitif.fr
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3 commentaires pour Soie

  1. Jyce dit :

    Salut, désolé mais je vais te parler de Bernard Werber car je me demande si tu l\’aurais lu ( mon commentaire ) si je l\’avais écrit plus bas au blog respectif.Je suis un grand fan et j\’ai lu presque tout ses chefs d\’oeuvres et pour moi, "avis personnel", le must reste encore "Les thanatonautes", j\’aurais également voulu savoir, si bien sûr tu as les infos, où se joue la pièce dont tu parles dans ton blog, je ne savais aucunement qu\’il avait une pièce et ça me motive énormément pour aller la voir.Je te remercie en tout cas pour ton article qui est ma foi bien construit, et j\’espère te voir bientôt dans mes commentaires sur mes blogs ( beaucoup moins intellectuel, je le conçoit )@ Bientôt JC

  2. Philippe dit :

    Pour répondre à JC : lorsque je clique sur le lien de ton site, il apparaît non disponible. Difficile dans ce cas d\’y faire des commentaires. Est-ce momentané ? Sinon, j\’indique toujours les coordonnées de l\’endroit où se joue le spectacle, coordonnées que tu trouveras en fin de texte. Phil

  3. Anne-Sophie dit :

    **pilou pilou** Bonjour!!** effectivement j\’étais passée sur ton site jeter un coup d\’oeil intéressé à toute cette culture, en tout cas ça fait bien plaisir à lire ^^ Je me permet de mettre un commentaire sur cet article d\’Alessandro Barrico, tout simplement parce que j\’ai eu un vrai coup de coeur pour son écriture depuis que j\’ai vu pendant le festival d\’Avignon l\’adaptation de "Novencento pianiste" , et du coup après j\’ai embrayé sur la lecture de "Chateaux de la colère" "City" et "Soie" dont il est ici question. Les romans de Barrico sont une vraie poésie que l\’on savoure mot par mot *** Voaloouu*** Sur ce très bonne continuation, je reviendrai sans aucun doute sur ton site °°°° =)

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